Ce travail de recherche vise l’art de l’acteur et dans une moindre façon le théâtre. Il s’inscrit d’emblée comme un travail de praticien du théâtre questionnant son travail. Il sera question avant tout d’une mise en perspective de cette double pratique : diriger des acteurs, diriger, accompagner de jeunes étudiants dans l’art de la scène. Cette opération de « domestication » artistique pourrait s’avérer simple si on se contentait d’exercer ce quasi monopole pour reprendre la critique de Nietzsche reprise par Peter Sloterdijk. Qui plus est, de nombreux blocages soulignés par les uns ou les autres se font jour. Des jeunes adultes rechigneraient-ils à la domestication, et/ou porteraient-ils en eux tous les avatars d’une société obnubilée par l’immunité et ses ersatz de sécurité ? Notre recherche maillée de réflexions personnelles liées à la pratique quotidienne, portera moins sur les causes que sur le questionnement de notre propre instrument : le corps humain en sa globalité, cerveau compris. Comment ce corps qui s’avère troué de toute part vit-il ? D’où vient-il ? Ainsi observant la cellule qui le fonde tout comme sa membrane qui l’immunise des dangers, puis quelques organes du corps qui laissent passer : air, aliments, images nous découvrons un corps de passages, un corps de porosité membranaire, complexe, subtile, inventive. Mieux nous peinons à la cantonner dans un dualisme commode. La frontière devient feuilletage d’externe et d’interne, tout en agissant comme frontière. Ce livre ouvert de l’instrument de l’acteur doublé d’un livre de mythologies baigné curieusement lui aussi de porosité donne singulièrement à réfléchir sur nos règles de société et pour ce qui nous concerne sur la position de la scène et de l’acteur en son sein. Toutefois nous ne saurions transposer des mécanismes biologiques sur le jeu de l’acteur ! Le voyage biologique et physiologique devient alors une fable pour notre réflexion. Une fable et un chemin de principes que nous dégageons : principe d’indistinction et de distinction, principe de porosité membranaire, processus plutôt que mécanismes, fonctions, principes du lien, du tressage. Avec Nietzsche, Artaud, Sloterdijk, mais nous aurions pu ajouter Derrida, nous appliquons moins ces principes que nous découvrons combien ces philosophes mettaient précisément en question notre culture occidentale, y compris dans notre façon de penser, opérant de fait une porosité que nous ne faisons que sortir de l’implicite. Fort de ces outils, de ce questionnement, nous interrogeons, au travers de nos pratiques, quelques fondements du théâtre : lieu du théâtre, masques, rêve, forces vitales et forces faibles, immobilité de l’ours de Kleist, le vide, avant de conclure sur une pratique qui cherche à faire du lien et faciliter les passages où se tient peut-être l’acteur, comme de comprendre le théâtre ; pore (port) du théâtre ?