En bref...
Ce séminaire est un cycle de conférences organisé par Katrin GATTINGER, et avec le soutien de l'ACCRA et de la Faculté des Arts de l'université de Strasbourg, dans le cadre du séminaire interdisciplinaire Transversal Master I et du groupe de travail « L’art traversé par le politique : discours, représentations et pratiques ».
Une inscription préliminaire (sur la plateforme Moodle) est obligatoire pour participer au séminaire (le nombre de places disponibles est fixé à 30 ; les étudiants de Master I non inscrits se présentant au séminaire ne seront pas évalués en fin de semestre, mais toute personne, doctorant ou chercheur, souhaitant assister et participer au séminaire est évidemment la bienvenue).
La ruse évoque chez tout un chacun des histoires incroyables de héros ayant réussi, contre toute attente, à mener une cause perdue au triomphe, à renverser un pouvoir : Shéhérazade, Lawrence d’Arabie, Tom & Jerry. Ce sont souvent les arts qui racontent ces exploits pleins de surprise, d’intelligence et de courage et provoquent le plaisir (malin) de voir la force vaincue.
Il ne fait aucun doute que l’art et le design sont emprunts de ruse, comme le montre Vilém Flusser, par l’art de faire, l'habileté technique, la compétence du geste. Georges Vignaux soulève à quel point la ruse est une « intelligence pratique », c’est-à-dire une intelligence qui se traduit dans le faire : c’est celle du navigateur, du vannier, du chasseur, du politique, qui parviennent à « mettre en relation la mobilité de l’intelligence et la rapidité de l’action » (Aristote).
Dans le domaine des arts cette approche invite à penser l’œuvre comme le résultat de cette intelligence pratique, mais aussi comme son moyen : si parfois il faut ruser pour faire œuvre (par exemple inventer une nouvelle technique ou créer en cachette), l’œuvre peut être aussi un stratagème adressé au spectateur (par exemple les jeux d’illusion ou effets de montage qui le leurrent) ou même une stratégie située dans un contexte « extérieur à l’art » (par exemple faire passer un message politique sous couvert d’art ou faire de l’œuvre un levier social).
La ruse est une pratique de l’inattendu, elle sort « des chemins tracés », elle fausse l’épreuve. Tout comme à l’ignorance stupide, elle s’oppose à la force rigide. C’est l’art de contourner les règles qui ne conviennent pas, c’est « créer ses propres espaces de libertés » (Vignaux). Pourquoi ne pas voir dans ces parallèles avec l’art une affinité réelle entre ces deux manières de résister et de créer par l’inconventionnel ?
Lier l’art et la ruse soulève cependant un ensemble de questionnements problématiques incontournables dont voici trois exemples : penser des œuvres en termes de ruse implique de situer l’art dans un contexte de compétitivité ou de conflit… lequel ? Que signifie « perdre » ou « gagner » en art, par l’art ?
Si l’œuvre est une ruse, elle possède une fonctionnalité et un objectif (inaperçus mais réels) : comment concilier cette approche avec l’idée que « l’art ne sert à rien » ?